0

Intrapreneuriat : Comment mettre en place une stratégie efficace et ré-enchanter l’entreprise ? par V Coll

Savez vous que la France est championne du monde…non pas de foot…mais du désengagement au travail : 54% des collaborateurs en France se disent complétement désengagés contre 37% dans le monde. C’est le résultat d’une étude parue en 2016 (1). Burn out, bore out, brown out, l’apparition et le développement de toutes ces nouvelles pathologies attestent bien d’un certain malaise des salariés au sein de leur entreprise. Un quart des salariés français pensent d’ailleurs la quitter d’ici 2018 (1). Or, un salarié heureux est 10% à 12% plus performant (1). Il y a donc matière à réflexion et une impérieuse nécessité pour les entreprises de trouver de nouvelles solutions afin de remobiliser les énergies.

C’est ce que semble proposer l’intrapreneuriat : plus de développement et d’épanouissement personnel, plus d’autonomie et surtout un formidable challenge pour lutter contre la routine. Et, la dernière étude de Deloitte datée de cet été (2) atteste de son intérêt grandissant côté salariés : 74% des participants à l’enquête souhaitent commencer la démarche d’intrapreneur d’ici les 3 prochaines années.

Mais, que recouvre exactement la notion d’intrapreneuriat ? Dans la littérature, Le terme désigne « le processus par lequel un individu ou un groupe d’individus, en association avec une organisation existante, crée une nouvelle organisation ou incite au renouvellement ou à l’innovation à l’intérieur de cette organisation » d’après Sharma et Chrisman, 1999 (3). « L’intrapreneur est le membre d’une grande entreprise qui, en accord avec elle et tout en restant salarié de son entreprise, possède un projet viable, intéressant, en lien avec l’entreprise et qu’il peut réaliser en son sein. Il est celui qui transforme une idée en activité rentable au sein d’une organisation », explique le Cabinet Advancia, 2018 (4).

Dès lors, pourquoi et comment le mettre en œuvre efficacement ? Bien utilisé, l’intrapreneuriat peut être un levier d’accélération de l’innovation, d’épanouissement des collaborateurs, de décloisonnement des organisations et in fine un formidable levier de transformation de l’entreprise. Mais, les pratiques n’en demeurent pas moins très hétérogènes avec des stratégies différentes que ce soit pour tirer profit de façon opportuniste d’une initiative spontanée, que ce soit pour instiller une dynamique intrapreneuriale ou encore pour transformer en profondeur l’entreprise et installer une véritable culture agile. Elles peuvent se traduire par la mise en place de structures séparées ou intégrées à l’organisation avec les modèles de la cellule intrapreneuriale, de la plateforme intrapreneuriale ou de la division intrapreneuriale (5).

Dans les faits, l’intrapreneuriat n’est pas un outil facilement reproductible. Rappelons-le, les solutions devront toujours être taillées sur mesure en fonction du contexte, de la culture et des objectifs stratégiques de l’entreprise. Chaque entreprise devra ainsi construire le dispositif qui lui ressemble en fonction de ses moyens et de ses ambitions. Mais, l’intrapreneuriat peut être à double tranchant. L’une de ses limites est qu’il n’embarque de bout en bout qu’une petite partie des salariés et peut être perçu comme un programme exigeant, trop sélectif et trop prenant. L’autre risque concerne son bon dimensionnement : faute de moyens ou trop ambitieux, il peut générer des frustrations et décourager les collaborateurs.

Mais, le principal enjeu reste sa pérennisation. Faute d’en comprendre tous les bénéfices immatériels, la Direction Générale peut raisonner court terme et être déçue des résultats économiques. Elle peut alors arrêter les programmes. Un travail de pédagogie et de lisibilité des enjeux est fondamental. L’intrapreneuriat exige de l’entreprise qu’elle ait réfléchie au préalable à revisiter ses méthodes de gestion et de management et qu’elle s’inscrive dans une stratégie long terme.

Tout l’enjeu au fond est de contribuer à l’éveil des sens et de remettre du sens au cœur de l’action. Pour renouer avec les attentes et besoins de ses collaborateurs, l’entreprise doit sortir de son rôle traditionnel pour redessiner le statut de salariés et inventer le travail de demain : un travail plus épanouissant alignant valeurs individuelles, valeurs collectives et missions de l’entreprise. C’est dans ce potentiel d’hybridation que l’intrapreneuriat peut apporter une solution. Comme le rappelle Peter Druker, l’un des théoriciens du management, « La raison d’être d’une organisation est de permettre à des gens ordinaires de faire des choses extraordinaires ».

(1) Chiffre issu de l’étude 2018 Steelcase / Ipsos sur l’Engagement et l’environnement de travail :

https://www.myrhline.com/actualite-rh/1ere-etude-mondiale-steelcase-ipsos-sur-l-engagement-et-l-environnement-de-travail.html

(2) Chiffre issu de l’enquête Deloitte sur l’intrapreneuriat :

https://www2.deloitte.com/fr/fr/pages/talents-et-ressources-humaines/articles/enquete-intrapreneuriat.html

(3) Chua, Jess H., et al. (2017). Defining the Family Business by Behavior. Entrepreneurship: Theory and Practice, Summer 1999, p. 19.

(4) Livre blanc de Crédit Agricole SA « Quand le changement vient de l’intérieur, voyage au coeur de l’intrapreneuriat »

http://www.primaveras.fr/data/company/311803/file/10085/credit-agricole-lintrapreneuriat-une-nouvelle-facon-de-travailler-dans-les-entreprises.pdf

(5) Bouchard, V., & Fayolle, A. (2011). Comment mettre en oeuvre l’intrapreneuriat?. Gestion, 36(4), 11-21.

Source : https://www.linkedin.com/pulse/intrapreneuriat-comment-mettre-en-place-une-strat%C3%A9gie-virginie-coll/